Alors que je retombais sur Red Dead Redemption (jeu auquel je joue quand le ciel normand est trop gris à mon goût), je me suis rendu compte à quel point le genre Western était peu exploité en jeu. Bien entendu, Deadlands (Ah, Brom…) existe mais son élément fantastico-historique, inspiré de la Ghost Dance (qui a mené aux tragiques événements de Wounded Knee), ne le qualifie pas dans le domaine Western stricto sensu. Il est évident que notre passion a toujours un élément de fantastique plus ou moins poussé. Il est en fait, sauf à de rares exceptions, toujours présent quand le jdr traite une période historique. C’est là bien compréhensible, quitte à rêver, autant rêver en grand. Quitte à voyager en mots et dans l’Histoire, autant ajouter un petit piment. James West serait bien d’accord quand on dit que ce genre est d’une malléabilité fabuleuse. On peut y trouver de l’aventure, une grande liberté, la possibilité de « créer » quelque chose (une propriété, une dynastie…), un environnement aux multiples facettes et des interactions en tout genre et de tous genres: fantastique, SF, Steampunk, horreurs, uchronies..
Dans le Western, l’homme y est minuscule, tentant de domestiquer son environnement et à la merci des autres hommes. La loi n’existe pas ou peu et à bien y penser, il existe de nombreux parallèles entre le genre post-apocalyptique et le western. A la différence que dans le dernier, l’homme construit un nouveau monde et que dans le premier l’homme a tout perdu. Cela crée une atmosphère constante d’insécurité dès qu’un inconnu apparaît, dès qu’un endroit inexploré est découvert. Les animaux, les aléas climatiques sont autant d’antagonistes montrant que chaque déplacement est une aventure potentiellement mortelle. Et nous qui nous plaignons des retards de bus…
Avant d’aller plus loin, parlons de quelques jeux de rôles qui mettent en scène nos garçons vachers et autres brutes..
Boot Hill de TSR avait tenté une percée dans le genre et il faut reconnaître que si le système changeait du jeu étendard, l’influence de D&D avec les figurines et les cartes l’a surtout transformé en un jeu de duel et de « gunslingers ». Il a quand même connu trois éditions mais il était difficile de sentir les grandes plaines et les paysages s’étendant à perte de vue.
En bien plus récent, le très intéressant Dust Devils permet de jouer toutes les histoires possibles avec un système sans dé mais avec des cartes à jouer (classiques) et des jetons de poker pour faire office de point de destin. En fonction de vos caractéristiques le MJ vous donne un nombre de cartes que vous allez jouer. Celui avec les plus hautes cartes emportera l’action. Pas besoin de vous y connaître, soyez rassurés. L’ambiance du jeu se veut proche d’Impitoyable où les joueurs vont avoir à gérer leurs démons intérieurs et où la narration est très présente.
Aces & Eights est aussi une référence dans le genre même si ces règles sont régulièrement critiquées pour être un peu lourdes. On notera aussi l’allusion au poker, comme si cela devait être un passage obligé. Très beau, il possède un abondant suivi.
Mais reconnaissons que dans le western, le setting est ce qui sera le plus important. Un système de jeu « réaliste » à la Chaosium fera parfaitement l’affaire et permettre de couvrir toutes les situations (sauf si vous voulez gérer les dommages comme dans un film de Sam Peckinpah). Tout dépendra des aventures que vous souhaiterez faire jouer. Et bien entendu, l’élément fantastique va invariablement frapper, on ne se refait pas. Ainsi, le film Cowboys et Envahisseurs, tiré de la BD éponyme est un improbable setting (et un film que l’on qualifiera de…personnel) mais peut donner de bonnes idées d’histoires en one-shot. Surtout avec Olivia Wilde.
On retrouve d’ailleurs un setting fantastique du fait des grands espaces où personne ne vous entendra crier. La campagne Red Eye of Azathoth pour Cthulhu de Kobold Press couvre plusieurs époques historiques (les joueurs projettent leurs esprits pour y parvenir ) et la partie Western se passe en Arizona et le mélange des deux un puits d’inspiration malgré ses défauts. Imaginons des cultistes en chariots allant de ville en ville, créant d’étranges événements, jusqu’à ce que quelqu’un raconte, tard le soir dans un saloon qu’il a …vu. Tout y est. Vous pouvez même déguiser ce scénario en banal scénario western où tout va déraper. Une autre idée: un grand méchant propriétaire que les joueurs doivent aller visiter car il a enlevé quelqu’un/volé des chevaux/ et quand les joueurs arrivent, son armée personnelle a été démembrée, tout le monde est mort sauf lui (bien sûr). Doit s’en suivre une alliance contre-nature, des mystérieux mercenaires qu’il avait engagés, une attaque la nuit venant du ciel. Bref, vous mâtinez le tout de tribus indiennes craintes de tous (avec qui les mercenaires fricotent de manière contre-nature) et vous avez un grand moment de jeu dépaysant. Quand les 7 mercenaires rencontrent Cthulhu..
Il existe aussi un scénario dans le supplément Etranges Epoques qui se passe lors de la Guerre de Sécession, qui mériterait un article pour elle seule.
Dans un prochain article sur les Découvertes, je reviendrai sur Far & Away (Horizons lointains) qui parle d’un partie de l’ouverture des territoires de l’Oklahoma. En s’inspirant de ce film, les joueurs peuvent avoir comme but de s’installer, d’avoir de la terre pour eux avec tout ce que cela amène comme épreuve. Ils peuvent aussi traverser de génération en génération la conquête de l’Ouest. Une mine (post 1849 *joke*) d’informations sera la très belle mini-série produite par Spielberg Into the West. On y voit le destin de deux familles de colons et indiennes à travers toute la conquête du pays. Inutile de dire que cela finit mieux pour l’une que pour l’autre et que cela donne parfois envie de se pendre. Cette série peu connue est un vrai chef d’oeuvre et pour en voir adapté des bouts en partie, elle recèle aussi de photos de PNJ et d’histoires fantastiques et parfois à peine croyable.
Deadwood, Hell on Wheels donneront aussi toute la matière en histoires et en source de PNJ. Cette dernière série est dans le trope de l’homme face à la nature et cette hostilité constante. Tout pour passer très aisément par le filtre du fantastique.
Si Deadlands (en français chez Black Book) est donc la référence dans le genre, le Far West avec-un-peu moins-de-fantastique-dedans est un genre qui n’attend que vous pour être exploré.
Avec ses terribles rencontres:
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=aLqIWd10ccY&w=560&h=315]