Tour d’Horizons – En remontant un fleuve et de la musique

Aujourd’hui, un Tour d’Horizon qui tient plus du Soupçon d’Inspirations, pour le dernier de la saison. (Je vous rassure, le reste de l’article sera sans rimes).

Depuis Joseph Conrad, remonter un fleuve est une expérience unique et si nous ne sommes pas en Afrique, je veux parler ici du cycle Sentier des Astres de Steffan Platteau, illustre écrivain belge de fantasy. Il est ce ces romans qui vous happent dès les premières lignes et Sentier des Astres en fait partie. Le monde se découvre par deux gabarres (et permet d’apprendre beaucoup de vocabulaire pour briller en soirée et pater vos joueurs) et nous suivons ainsi le cours d’un fleuve qu’une vingtaine de personnes remontent, sans savoir véritablement ce qu’il y a derrière cette expédition, dans une agréable mise en abyme avec le lecteur.

Quelque part dans la nordique forêt du Vyanthryr, les gabarres du capitaine Rana remontent le fleuve vers les sources sacrées où réside le Roi-diseur, l’oracle dont le savoir pourrait inverser le cours de la guerre civile. À bord, une poignée de guerriers prêts à tout pour sauver leur patrie. Mais qui, parmi eux, connaît vraiment le dessein du capitaine ? Même le Barde, son homme de confiance, n’a pas exploré tous les replis de son âme. Et lorsque les bateliers recueillent un moribond qui dérive au fil de l’eau, à des milles et des milles de toute civilisation, de nouvelles questions surgissent. Qui est Le Bâtard ? Que faisait-il dans la forêt ? Est-il un danger potentiel, ou au contraire le formidable allié qui pourrait sauver l’expédition de l’anéantissement pur et simple ?

Ce livre est sorti sous les louanges du style de Stephan Platteau. Et force est de constater que nous n’allons pas être très orignaux.  Son style est d’une profondeur rare, d’une maîtrise extrême et chaque phrase est polie pour faire briller de tout feu la magie des mots. Le monde se crée ainsi pour le lecteur, qui comme les personnages le découvre au-delà des brumes. Malgré l’imposant pavé, nous entrons tout en douceur dans un rythme faussement lent (mais sans être ennuyeux) et nous avons ainsi tout le loisir de laisser la prose du narrateur entrer en nous. Contrairement à ce que nous reprochons aux oeuvres massives de fantasy, à savoir imposer d’entrée une masse déroutante d’informations et de personnages, on trouve un dramatis Personae des plus utiles, qui devrait être INDISPENSABLE aux oeuvres (trop?) imposantes comme celles qui semblent être la norme dans notre hobby. Empruntant aux mythes celtes puis hindous (quel mélange sublime, même si bien improbable au premier abord), c’est une oeuvre vraiment unique qui nous est donnée à lire. Là encore, de par la narration du barde, il n’y a pas de narrateur omniscient qui s’épand sur des pages et des pages (ni de discours introductifs et bancals de personnages qui ont pour fonction de les transformer en office de tourisme) et si nous découvrons juste une rivière en incipit, c’est progressivement que le monde et les personnages s’offrent à nous. Tout y est fluide et s’enchaîne avec grâce et harmonie (et coups d’épée…)

Quand l’histoire prend son rythme,  le lecteur se rend compte de son attachement pour tous les protagonistes (funeste erreur…) et il a l’impression de faire partie de cet équipage disparate où chacun a sa personnalité propre. Et si les enjeux sont graves, des touches d’humour toujours légères renforcent notre attachement au récit (les insultes sont notamment très bien trouvées). Ce dernier est aussi ponctué de flashbacks, toujours narrés par Fincan le Barde.

Si MANESH est le premier tome, les Moutons électriques viennent de sortir le deuxième tome (avec une carte cette fois) et nous ne pouvons que vous recommander de vous procurer les deux tomes. Attention néanmoins à ne rien lire du résumé de SHAKTI si vous voulez conserver la joie des découvertes.

Poétique, onirique, enchanteur et aussi brutal et cruel, Les Sentiers des Astres possède tous les éléments des grands récits classiques, de ces chansons de gestes indémodables. De par sa créativité, son style enchanteur et enchanté, Steffan Plateau est le vrai barde qui nous emmène découvrir un monde qui ne vous quittera plus.

Comme toujours, deux versions sont disponibles chez les Moutons Electriques, en ebook ou un très joli format cartonné pour faire honneur à ce chef d’oeuvre.

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Quoi de mieux que lire en musique pour mettre encore plus en perspective la prose d’un auteur?

Nous vous conseillons ainsi la chaîne youtube de Maxime Lennoz. De très bons morceaux de 6 minutes environ qui valent leur pesant d’imaginaire.

 

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